Analyse environnementale : tout ce qu'il faut savoir !

28 mai 2024 par
Jérôme


Qu'est-ce que c'est ?

L’analyse environnementale est un état des lieux des aspects et impacts environnementaux (directs et indirects) engendrés par les activités de l’organisme.

Pourquoi est-elle nécessaire ?

L’analyse environnementale est une des premières étapes dans la mise en place d’un Système de Management Environnemental (SME). 

L’analyse environnementale et plus généralement d’une démarche environnementale et RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises) permet à un organisme de : 

  • identifier, mesurer et analyser les impacts directs et indirects des activités de l’organisme sur l'environnement ; 
  • déterminer des actions pour accroître les effets positifs et réduire les effets négatifs sur l’environnement ;
  • se conformer à la réglementation environnementale ;
  • optimiser l’utilisation des ressources et donc de réduire ses coûts ;
  • fédérer ses collaborateurs autour d’un projet d’envergure ;
  • prévenir les risques en cas d’incident ou d’accident.
  • démontrer sa conformité légale et réglementaire aux parties intéressées ;
    améliorer la réputation et l’image de l’entreprise auprès des parties intéressées.

Comment la réaliser ?

Étape 1 : préparer l'analyse environnementale

Cette analyse nécessite un travail d’équipe et une grande préparation, notamment pour recueillir les données indispensables.

La mission de ce groupe de travail sera de recueillir les informations nécessaires à l’identification, l’analyse et la hiérarchisation des impacts environnementaux ainsi que de piloter la démarche d’analyse environnementale.

Face à des environnements, des métiers, des contraintes qui peuvent être très diversifiés selon les activités, il est primordial d’avoir une vision d’ensemble et donc avoir autour de la table des personnes susceptibles d’apporter les informations indispensables à une analyse complète. Pour cela, tu devras constituer un groupe de travail pluridisciplinaire.

Pour que ce groupe de travail soit efficace, tu devras définir les rôles de chacun. Voici un exemple très simple de ce que pourraient être les rôles au sein de ton groupe : 

  • Animateur
    • Veille à ce que les objectifs soient atteints
    • Gère la discussion
    • Coordonne le travail ou la discussion de la coordination
    • Veille à ce que le travail soit fait et les délais respectés
    • Participe au travail des autres membres

  • Scribe
    • Prend note des décisions prises
    • Prépare le compte rendu ou coordonne la rédaction du compte rendu
    • Présente les travaux

  • Expert métier
    • Cherche, recueille et partage les informations nécessaires
    • Effectue l'analyse de données

Ça pourrait te paraître secondaire, mais si tu peux constituer un groupe de travail dont les membres s’entendent bien, alors ce sera encore mieux.

Comme je te l’ai déjà dit dans des articles précédents, définir des outils et des méthodes adaptés constitue un facteur clé de succès de ton analyse environnementale.

Il existe ainsi un certain nombre d’outils pour mener ton analyse : référentiels, check-list, documents Excel, ou encore des logiciels spécialisés comme GEAR.

Par ailleurs, il est important de choisir une méthode et un système de cotation adaptés à ton organisme pour réaliser ton analyse et déterminer le seuil de criticité à partir duquel l’impact est significatif. Je précise tout de suite que la conformité aux exigences légales et réglementaires est un élément clé de la cotation.

Cette analyse environnementale peut parfois (souvent) se faire en interne sans aucune ressource financière particulière dédiée. Cependant, on peut aussi imaginer que tu aies un budget alloué à cette analyse, par exemple pour te faire accompagner par une personne extérieure.

Tout le monde n’est pas spécialiste de l’analyse environnementale et c’est bien normal. Cependant, une compréhension claire et partagée des enjeux de cette analyse est essentielle pour la réussite de la démarche. Il faut donc que tous les membres de ton groupe de travail disposent des connaissances nécessaires pour jouer pleinement leur rôle. 

Tu dois alors identifier les connaissances nécessaires pour réaliser efficacement cette analyse environnementale, les personnes qui ne les ont pas et former celles-ci. 

La communication est essentielle dans la démarche et elle s’anticipe. Tu peux communiquer sur ta démarche environnementale à tes parties intéressées externes. 

Tu peux également communiquer en interne pour informer sur l’avancée de la démarche ou préparer le terrain sur la conduite du changement.

Tu dois donc déterminer : 

  • ce que tu veux communiquer,
  • à qui tu veux le communiquer,
  • comment tu souhaites le communiquer,
  • quand ou à quelle fréquence le communiquer.

Étape 2 : lister les activités de l'organisme

Pour lister les activités de l’organisme, il faut tenir compte de trois dimensions : 

  • Ce qui entre : c'est-à-dire tes achats de biens et services auprès d’un fournisseur ou d’un prestataire ;
  • Les activités et les consommations : correspond à vos processus internes (réception, stockage, production, commerce, expédition, livraison…) et aux consommations faites pour la réalisation de ces processus ;
  • Ce qui sort : on pense ici particulièrement aux déchets et aux rejets.

Étape 3 : identifier les exigences légales / réglementaires

Il faut ici déterminer les textes de loi qui encadrent les activités identifiées précédemment. Ces textes peuvent provenir de normes internationales, de la loi française, d’ordonnances, de normes réglementaires (décrets, arrêtés), jurisprudence ou encore d’actes administratifs (ministériels, préfectoraux ou municipaux).

Étape 4 : analyser la sensibilité du site

En fonction du lieu d’implantation de ton organisme, l’impact de tes activités ne sera pas le même. De plus, tu peux avoir à respecter des exigences de parties intéressées spécifiques : 

  • proximité des riverains ;
  • proximité et activités des entreprises aux alentours ;
  • faune et flore ;
  • données météorologiques ;
  • données géologiques…

Il sera donc primordial de caractériser et connaître le milieu environnant et particulièrement sa sensibilité.

Étape 5 : réaliser l'inventaire des AE et IE

Tu dois maintenant identifier les éléments qui peuvent interagir avec l’environnement lorsque tu réalises tes activités. C’est qu’on va appeler un aspect environnemental.

Un aspect est un élément quantifiable et/ou mesurable. Par exemple : un niveau sonore produit par une machine, une quantité d’eau rejetée… 

Un aspect environnemental peut avoir un impact sur l’environnement. Un impact environnemental, ce sont toutes les modifications de l’environnement provoquées par des activités… de sa conception à sa fin de vie.

L’impact environnemental peut se produire à plusieurs niveaux. On retient généralement 5 domaines : 

  • les eaux superficielles
  • l’air
  • le sol
  • le sous-sol
  • le bruit 

Selon tes activités et l'environnement dans lequel tu évolues, tu peux ajouter les domaines suivants : 

  • les vibrations
  • les déchets
  • les énergies
  • le visuel
  • la lumière
  • l’odeur

Un impact est dépendant de la sensibilité du milieu en interaction. Ainsi, un même niveau sonore n’aurait pas le même impact ressenti, qu’il soit produit dans une zone industrielle ou dans un quartier résidentiel.

Pour résumer : 

Activité (source) → Aspect (cause)→ Impact (conséquence)


L’inventaire des aspects et impacts environnementaux doit être fait en prenant en compte les activités réalisées par l’organisme selon trois modes : 

  • normal : c’est-à-dire quand les activités de l’organisme se déroulent comme prévu ;
  • dégradé : c’est-à-dire en cas de dysfonctionnement dans le déroulement des activités ;
  • urgence : c’est-à-dire prévoir les situations d’urgence qui pourraient raisonnablement survenir.

Par exemple, en cas de panne, l’utilisation de matériel de secours (générateur, compresseur…) peut engendrer de nouvelles nuisances sonores.

Étape 6 : identifier les AES

Identifier les Aspects Environnementaux Significatifs (AES), c’est hiérarchiser les aspects environnementaux inventorier. Cette hiérarchisation vise deux objectifs : 

  • identifier les aspects qui feront l’objet d’action de prévention, c'est-à-dire les Aspects Environnementaux Significatifs (AES) ;
  • aider à la planification de ces actions selon leur priorité.

Un Aspect Environnemental Significatif (AES) c’est un élément généré par les activités de l’organisme et qui pourrait avoir un impact significatif sur l’environnement.

Pour réaliser cette hiérarchisation, on va commencer par évaluer les impacts environnementaux en utilisant une matrice de cotation. 

Personnellement, j’utilise la méthode ci-dessous : 

PROBABILITÉ x SENSIBILITÉ DU MILIEU x GRAVITE = Criticité brute

Criticité brute x MAITRISE = Criticité finale

Le critère de probabilité

devra permettre de différencier la cotation selon le mode normal et le mode dégradé. Il pourrait être par exemple :

1

Extrêmement faible

Mode normal : maximum une fois par an

Mode dégradé : l’évènement ne s’est jamais produit. Il y a très peu de risque que cela se produise

2

Peu probable

Mode normal : maximum 1 fois par semestre

Mode dégradé : l’évènement se présentera rarement

3

Probable

Mode normal : maximum 1 fois par mois

Mode dégradé : l’évènement se produit occasionnellement

4

Très probable

​Mode normal :   plus d’une fois par mois

Mode dégradé : l’évènement se produit régulièrement ou de manière certaine


Le critère de sensibilité du milieu

est quant à lui un peu plus complexe. L’idée sera de déterminer une cotation par domaine. Mais pour faire cela, il faut évaluer la sensibilité des milieux propre à ton organisme. 

Pour cela, on peut se baser sur cette check-list simplifiée : 

Facteur : Faune et flore aquatiques

Paramètres de détermination : 

  • Nombre de cours d'eau (amont et aval) 
  • Débit moyen du cours d'eau 
  • Volume d'eau rejeté par l’organisme
  • Distance du site 
  • Type de faune-flore

Facteur : Conditions climatiques

Paramètres de détermination : 

  • Direction et vitesse du vent
  • Fréquence des orages ou autres phénomènes climatiques
  • Précipitation moyenne annuelle
  • Sensibilité locale au phénomène d’inversion thermique et/ou aptitude locale à une bonne dispersion des effluents (présence ou non de reliefs, effet de cuvette, brouillard…)


Facteur : ​Milieu humain bâti et urbanisme

Paramètres de détermination : 

  • Densité de population et proximité
  • Quantité de bâtiments et proximité (sous les vents dominants)

Facteur : Faune et flore terrestre

Paramètres de détermination : 

  • Type de faune-flore


Facteur : ​Zones protégées ou classées, sites sensibles ou patrimoine culturel

Paramètres de détermination : 

  • Nature (Natura 2000, ZPPAUP, ZNIEFF, ZICO…)
  • Distance du site


Facteur : ​Type d‟usage du sol ou activités

Paramètres de détermination : 

  • Type
  • Distance du site


Facteur : ​Contexte géologique

Paramètres de détermination : 

  • Nature des formations géologiques du terrain sur lequel est implantée l'installation
  • Épaisseur des couches souterraines
  • Perméabilité 


Facteur : ​Risque sismologique

Paramètres de détermination : 

  • Fréquence et intensité

Facteur : Nappe phréatique

Paramètres de détermination : 

  • Nature de l'aquifère
  • Profondeur de la nappe


Facteur : ​Captage d‟eau potable

Paramètres de détermination : 

  • Quantité ?
  • Distance ?


Facteur : ​Risques d‟inondation (remontées de nappe)

Paramètres de détermination : 

  • Fréquence et intensité

Facteur : Réseaux et servitudes : axes de communication et trafic

Paramètres de détermination : 

  • Densité du trafic
  • Niveaux sonores résiduels
  • Nombre de plaintes des riverains

Bien sûr, tu peux compléter ce tableau pour qu’il soit au plus proche de ta situation.

Ensuite, il faut attribuer un niveau de sensibilité à chaque domaine. 

Sensibilité du milieu : importante

Score : 4

Sensibilité du milieu : moyenne

Score : 2

Sensibilité du milieu : préoccupante

Score : 3

Sensibilité du milieu : importante

Score : 4

Sensibilité du milieu : faible

Score : 1

Le critère de gravité

est assez simple et pourrait être évalué comme ceci :

1

Sans gravité

Aucun ou faible impact sur l’environnement.

2

Peu grave

Impacts modérés sur l’environnement. Éléments pouvant un effet néfaste, mais réversible, à court et moyen terme sur l’environnement.

3

Grave

Impacts importants sur l’environnement. Éléments pouvant un effet néfaste, mais réversible, à long terme sur l’environnement.

4

Très grave

Impacts catastrophiques sur l’environnement. Éléments impactant considérablement l’environnement et de manière irréversible.

Le critère de maîtrise

mesure l’efficacité des dispositions mises en place. Pour catégoriser ces mesures, on peut utiliser la méthode 5M (Matière, Matériel, Milieu, Méthodes, Main d’œuvre).

0,1

Complète

Mise en place d’une organisation (surveillance, maintenance…) et de moyens techniques permettant de limiter au maximum l’impact sur l’environnement.

0,25

Efficace

​Mise en place des moyens permettant de limiter au maximum l’impact sur l’environnement.

0,5

Limitée

Mise en place de quelques moyens permettant de limiter en partie l’impact sur l’environnement.

1

Inexistante

Aucun dispositif n’a été mis en place pour réduire l’impact sur l’environnement.

Personnellement, j’aime bien utiliser des scores de maîtrise permettant de démontrer que la maîtrise atténue la criticité brute. Cependant, on peut tout à fait imaginer utiliser des scores allant de 1 à 4. 

Tu as maintenant tous les éléments pour évaluer les aspects environnementaux significatifs. Tu dois définir le seuil de criticité (C) à partir duquel un aspect environnemental sera significatif. En reprenant tous nos éléments, ça pourrait une matrice comme celle-ci : 

< 2

Mineur

Aspect mineur ne nécessitant pas d’action particulière

2 < C ≤ 5

Faible

​Aspect qui pourrait accroître à court ou moyen terme en cas de défaillance des mesures de maîtrise existantes.

5 < C ≤ 13

Modéré

Aspect ayant des impacts importants sur l’environnement. Des actions de prévention sont nécessaires.

> 13

Significatif

Aspect aux effets dramatiques sur l’environnement. Des actions de prévention doivent être mises en place dans les plus brefs délais.

Cette cotation peut être amenée à évoluer en fonction de tes objectifs.

Grâce à cette matrice, tu es désormais en mesure de hiérarchiser tes aspects environnementaux et d’identifier ceux sur lesquels tu dois concentrer tes efforts et tes ressources.

Étape 7 : déterminer des actions de prévention

Maintenant que tu as identifié tes aspects environnementaux significatifs (AES), tu vas pouvoir t’appuyer sur cette hiérarchisation pour déterminer des actions de prévention pertinentes, en fonction de tes objectifs pour diminuer tes nuisances sur l’environnement.

Comme pour les autres étapes de la démarche d’évaluation environnementale, tu ne vas pas faire ce travail tout seul. Tu t'appuieras sur ton groupe de travail. Selon les cas, tu peux même constituer des groupes spécifiques de réflexion pour le traitement d’un risque. Instaurons ici un principe important : “celui qui fait, est celui qui sait”. Tu verras qu’impliquer les premiers concernés par l’aspect sera souvent bénéfique pour identifier des actions réellement efficaces.

Pour définir ces actions, t’appuyer sur les neuf principes de prévention. Initialement établit pour la sécurité et la santé des salariés, mais qui peuvent. Bien sûr, il ne suffit pas de planifier des actions. Il faudra les mettre en œuvre, suivre leur état d’avancement et s’assurer qu’elles apportent les résultats escomptés.

J’ai déjà rédigé un article sur la mise en place des actions de prévention. Pour y accéder, c’est par ici.

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